« Le réseau est le dénominateur commun de nos différentes business units », Richard Grégoire DG de EET France

Richard Grégoire a fait son entrée chez EET Group en 2017, il sera rapidement nommé directeur général de la filiale française. Photo DR

Le plus souvent, les distributeurs sont spécialisés en Audio / Vidéo, en sécurité ou en réseau, ceux qui regroupent l’intégralité de cette offre avec en plus une ouverture vers le Smart Building, ne sont pas légion. Il en existe au moins un, c’est EET. De par la transversalité de son offre, le groupe danois est un acteur atypique dans l’univers de la distribution spécialisée. Richard Grégoire, directeur général de la filiale française nous éclaire sur son entreprise, son marché, sa stratégie.

SIM : Pouvez-vous nous présenter le groupe EET ?

Richard Grégoire : EET est une société 100% danoise, créée en 1986. Elle opère dans 23 pays différents en Europe principalement et emploie 700 personnes dont 450 commerciaux. Le chiffre d’affaires de l’exercice 2021 s’établit à 575 M€. Nous comptons 32000 clients en Europe, exclusivement B2B, sur des secteurs assez verticalisés voire de niche, ce qui fait que l’on est peu connu. Historiquement, nous l’étions davantage pour la pièce détachée, suite au rachat, à l’époque, d’Europarts [EET désormais, ndlr]. La filiale française est la plus importante du groupe, nous y employons 65 collaborateurs, majoritairement des commerciaux. Nous disposons d’un entrepôt, mais le gros de l’activité logistique pour les « petits » produits se trouve au Danemark. Les produits plus volumineux sont stockés en France. Il faut savoir aussi que l’entreprise est divisée en deux branches : « Solutions » et « Composants ». En France, les deux divisions sont représentées et chacune d’elles est composée de Business Units. Dans la division « Solutions », on retrouve les solutions Audio/Vidéo, surveillance/sécurité et réseau. La division « Composants » regroupe la partie Pièces détachées pour serveurs, imprimantes et PC, la partie points de vente électroniques, traçabilité (tout ce qui est lecture du code barre, impression et traitement) et enfin, une dernière BU « Consumer Electronic » qui comprend des produits comme des souris, des claviers, d’une manière générale des accessoires pour IT, mais qui ne sont pas des pièces détachées. Il est à noter que dans l’activité « Consumer Electronic », nous commercialisons également des bornes de chargement pour les véhicules électriques. Nous sommes agréés « Advenir », les bornes que l’on vend bénéficient donc des aides de l’Etat.

« En France l’intégralité de l’offre du groupe est représentée. »

SIM : Cette transversalité est-elle simple à pratiquer ? Quelle est votre logique ? Comment faites-vous pour être présents sur tous ces métiers ?

RG : Non, ce n’est pas simple de devenir un acteur qui agit sur tous ces domaines, mais c’est une stratégie d’avenir et c’est une caractéristique de EET. La logique est simple : ce qui relie tous ces « métiers » c’est le réseau. Le réseau est le dénominateur commun de nos différentes business units. Pour parvenir à être présents sur l’ensemble de ces métiers, nous avons suivi deux axes de développement : la croissance organique et la croissance externe. Pour vous donner un ordre d’idée, sur les 20 dernières années, nous avons racheté 48 sociétés. Lorsque nous faisons de la croissance externe, dans la majorité des cas, nous gardons la totalité du personnel et ce, pour la simple et bonne raison que, comme je l’ai déjà évoqué, nous avons besoin de commerciaux spécialistes. Il est donc important pour nous de conserver les compétences. La continuité dans la compétence « produits », la compétence « marché » et la relation avec les fabricants est fondamentale.

SIM : Avez-vous des projets de rachat dans un avenir proche ?

RG : Nous en avons toujours. Il y a une forte volonté de poursuivre notre croissance externe. Le rachat de l’entreprise par son management début avril 2022 n’a pas entamé notre volonté de poursuivre les opérations de croissance organique et externe et nous disposons pour cela d’une importante capacité d’investissement.

SIM : Comment vous définissez-vous ?

RG : Notre objectif est d’être le distributeur de niche préféré des revendeurs avec la plus grande et large offre de produits et solutions disponibles sur le marché. Pour prendre un exemple, nous ne vendons pas particulièrement du PC, mais plutôt tout ce qui est autour du PC. Nous nous positionnons sur des marchés à vraie valeur ajoutée que nous élargissons sans cesse. Dans notre division « Surveillance et sécurité », par exemple, nous avons récemment développé une offre sur des drones professionnels pour proposer des solutions de surveillance mobiles embarquant de l’intelligence artificielle. Il faut savoir que nous ne faisons pas de la distribution pure et dure car pour mettre en œuvre les solutions et produits que nous commercialisons, il faut des compétences et mes équipes commerciales sont vraiment très spécialisées. Aujourd’hui, la majeure partie de nos commerciaux travaillent sur une seule BU. Nous revendiquons notre qualificatif de distributeur spécialiste à valeur ajoutée.

SIM : Comment voyez-vous l’évolution de la distribution sur vos marchés ? Une dimension européenne est-elle indispensable à l’avenir ?

GR : Sur le marché de l’audio/vidéo, il se signe très peu de contrats pan-européens. En revanche, sur celui de la surveillance et sécurité c’est plus courant tout comme sur celui du point de vente. C’est souvent une question de maturité de marché. Certaines marques sont très protectionnistes, elles estiment que les prix doivent être adaptés. Mais, ce n’est qu’une question de temps. L’érosion des marges fait que la distribution prend de plus en plus d’importance, la professionnalisation du réseau étant obligatoire, les acteurs se raréfient. La conséquence est que moins vous avez d’acteurs, moins vous avez besoin de contrats locaux et plus il est compliqué d’obtenir un encours important chez les fabricants. Résultat, vous passez par la distribution. C’est un schéma classique. Le distributeur est là pour aider le fabricant à disposer de stock, transférer la compétence produit vers son réseau et puis de là, vers les intégrateurs pour leur assurer de l’encours, les former et les aider à répondre aux besoins des clients finaux.


Mini bio

Après 7 années dans les rangs de l’armée de l’air et plusieurs missions essentiellement en Afrique et Croatie, Richard Grégoire intègre un premier job dans l’informatique industrielle chez IFM et ensuite chez un constructeur d’imprimantes de billets d’avion IER où il fait ses premiers pas dans la distribution BtoB. Après un passage chez ScanSource entre 2012 et 2017, il fait son entrée chez EET Group où il sera rapidement nommé directeur général de la filiale française.


SIM : Comment EET a-t-elle vécu l’épisode Covid ?

GR : Notre présence sur différents domaines d’activité nous a permis de passer la période Covid d’une manière un peu moins douloureuse que si nous avions été mono-activité ou mono-produit. Bien sûr, nous avons été impactés, notamment sur notre BU Point de vente et équipement du magasin. Pendant les périodes de confinement, les surfaces de vente étaient fermées et les investissements gelés. Les segments Audiovisuel (éducation, affichage dynamique) et Equipement des entreprises ont été les deux BU les plus impactées par la pandémie. En revanche, nous avons connu un retournement du marché dès 2021. Une bonne partie des salariés est revenue sur son lieu de travail et dans le même temps, nous avons vendu énormément de webcams, de souris et d’écrans. Fin 2021, cette mauvaise séquence était terminée et nous avons même retrouvé un volant d’affaires qui nous a fait réaliser une très bonne année.

SIM : Où en est la dynamique du marché aujourd’hui ? Souffrez-vous de problèmes d’approvisionnement ?

GR : La dynamique de marché est bonne, il y a des projets mais… aussi des problèmes d’approvisionnement. Aujourd’hui, mon principal défi est d’obtenir du matériel. Si nos clients intègrent désormais cette contrainte dans leurs projets, ma vraie problématique est de ne pas savoir quand je serai livré. Vous n’ignorez pas qu’une grosse partie du cœur mondial de la production des produits informatiques est située en Chine où toutes les usines sont actuellement à l’arrêt en raison de la pandémie qui sévit en Asie. Selon les dernières informations, un démarrage est annoncé au troisième trimestre. Je ne parle pas de situation « normale »… mais de « redémarrage ». Il ne faut pas se voiler la face, 2022 sera totalement impactée par ces aléas dans la disponibilité des produits. Il est à noter que tous les fabricants ne sont pas logés à la même enseigne. Si l’on prend le cas de Samsung, on peut dire que le Covid « a eu du bon », parce que la marque a su se réorganiser. Elle dispose maintenant de plusieurs unités de production à travers le monde et ne dépend plus d’une seule usine pour fabriquer une ligne de produit. Par exemple, une unité de production de moniteurs implantée au Mexique a pris la relève d’une usine Vietnamienne fermée pour cause de Covid.  En revanche, la fabrication de composants est localisée en Chine et à Taïwan et il n’y en a pas ailleurs. D’une manière générale, le risque pour les fabricants est que les distributeurs changent de fournisseurs.

SIM : Quelle est votre politique de référencement ?

RG : Mon objectif est d’intégrer à notre catalogue des marques leader du marché dans chaque domaine d’activité pour répondre aux besoins de nos clients. Mais je dois aussi, dans la conjoncture marquée par les problèmes d’approvisionnement que nous avons évoqués précédemment, trouver des alternatives pour ne pas laisser mes clients en plan. Par exemple, des ruptures de composants impactent la fabrication des vidéoprojecteurs interactifs pour le marché de l’éducation. Cette pénurie nous amène à recevoir des demandes sur des écrans interactifs. Pour pallier ces problèmes de disponibilité de projecteurs et migrer vers des écrans interactifs, nous avons étendu l’accord de distribution sur la France que nous avions avec le fabricant Smart Technologie. Mis à part ces problèmes conjoncturels, nous avons également signé un accord de distribution avec le finlandais Artome qui fournit des solutions de vidéoprojection et conferencing mobiles. Parmi les marques que nous avons récemment rentrées, je citerais Hanhwa Techwin dans le domaine de la sécurité. Par ailleurs, nous mettons en avant des marques comme Viewsonic qui figuraient déjà à notre catalogue.

SIM : Vous mettez en avant votre politique environnementale, pouvez- vous nous en dire plus ?         

GR : Le respect de l’environnement fait partie de l’ADN de l’entreprise depuis longtemps. Nos origines nordiques n’y sont certainement pas pour rien. Nous avons été très vite conscients de notre responsabilité environnementale. Depuis plusieurs années, nous plantons des arbres pour compenser notre empreinte carbone, nous allons dépasser le cap des 500 000 arbres plantés. Concrètement, toutes les cinq expéditions nous plantons un arbre. L’idée est de compenser l’empreinte carbone des transporteurs et d’une manière générale celle liée à l’activité de l’entreprise. Aujourd’hui, nous nous réjouissons de pouvoir revendiquer un bilan carbone positif. Je précise aussi que notre flotte de véhicules est hybride. Nous n’avons plus d’emballage plastique, ils sont tous en papier ou carton. Le seul élément plastique qui nous reste, c’est le ruban adhésif, et encore, il est en voie de disparition… J’ajoute que le processus de sélection des fabricants et autres partenaires intègre également cette démarche. Tout le monde y gagne ! C’est bon pour la planète, pour l’entreprise et bien sûr, nos clients, d’ailleurs une bonne politique RSE devient indispensable dans les appels d’offres.

« Nous nous distinguons de la plupart de nos concurrents par le fait que nous sommes très spécialisés. »

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